Quatre petites notes de musique !

Tôt ce matin, je terminais ma session de home trainer – rapport au lointain triathlon – et allais retrouver la chaleur de ma salle de bain, musique dans les oreilles, lorsque quatre petites notes de musique vinrent à passer.

Quatre petites notes et soudain, un frisson.

Un mercredi froid et pluvieux de 1992. Le bruit d’une voiture qui décélère. C’est l’heure. J’empoigne sans conviction mon petit cartable jaune et bleu, ferme la porte à clef et saute dans une Xantia verte. J’embrasse mon grand-père et il fait demi-tour dans la cour. Il ne faut pas être en retard. L’exactitude est la politesse des rois qu’il dit, le colonel. Je fais la moue en bouclant ma ceinture : n’empêche, quelques minutes de moins, ce serait toujours ça de gagné ! Il me sourit et comme pour me réconforter, monte le son de l’autoradio ; the Platters. Il a une cassette avec tous les tubes du groupe américain des années 50. Nous échangeons deux, trois banalités – mes résultats scolaires, le violon, mon lapin nain – et rien de plus ; deux taiseux. Ou deux pudiques, allez savoir.

Les kilomètres défilent, les titres s’enchaînent. Je me laisse porter par les mélodies tandis que l’odeur de la cigarette froide me froisse les narines.

Smoke gets in your eyes… Je sais que lorsque cette chanson commence, nous sommes sur le point d’arriver et dans quelques secondes, je devrai descendre. Mais je n’en ai aucune envie. D’abord parce que le solfège, j’aime pas ça et il me le rend bien. Et puis parce que j’aime avoir mon grand-père et les Platters pour moi toute seule ! Alors j’essaie de grapiller encore quelques instants.

La pluie a cessé. Il dit « Allez, au revoir, fille ». Alors, je grimpe à pas pesants les marches d’un escalier en colimaçon. Dans ma tête, je chantonne : “Now laughing friends deride... Tears I cannot hide... Oh... So I smile and say, when a lovely flame dies… Smoke gets in your eyes... Smoke gets in your eyeees !”. Et je pousse la lourde porte en bois sombre de ma salle de torture.

Quatre petites notes de fugaces qui, l'espace d'un instant, font revivre les êtres chers !

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Variations sur un thème matinal de Perfetti, opus n°1 🎻🎺🥁

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Une nouvelle année ! 😊