Moments de plage
Les plages de nos vacances sont comme une scène de théâtre où la vie se rejoue chaque été, avec ses rituels immuables et sa bande sonore intemporelle. Cette ambiance musicale mêlée de vagues, de cris, de rires et de pleurs…
Je m’assois sur mon plaid Décathlon qui passe au lavage à 30° (le pragmatisme a ceci de tragique qu’il a relégué au placard ce magnifique fouta couleur crème en coton égyptien déraisonnablement acquis après lecture d’un magazine prônant l’art d’une vie simple) et observe cette petite société en effervescence.
Une journée à la plage, c’est plein de petits moments qui, mis bout à bout, tissent une toile de souvenirs précieux :
Analyser les horaires et les coefficients de marée dans l’almanach, rituel matinal fondamental.
Parcourir en sautillant le petit chemin ombragé qui mène à l’Eden en transportant tout à la fois l’attirail du parfait constructeur de châteaux de sable, celui de l’ambitieux pêcheur de crabes, de l’intrépide bodyboarder et du fragile apprenti-nageur.
Croiser les gens, les enfants que l’on croise désormais chaque année. Sourire un peu, timide invitation à jouer ensemble.
Regarder ce couple descendre les quelques marches qui les séparent du sable, main dans la main par-delà les ans ; « Fais attention de ne pas glisser ! Attends, appuie-toi sur mon bras » lui murmure-t-il tendrement.
Sauter sur son paddle et partir au large, s’arrêter, s’assoir, s’imprégner du silence de la Manche, balancer ses pieds dans l’eau froide et soupirer ; « Rappelle-moi pourquoi on ne passe pas notre vie ici ? ». Hum… Après tout… Peut-être est-ce parce que ces moments sont éphémères qu’ils sont si précieux.
Chercher le plus beau coquillage, pester contre ces milliers de berniques qui pullulent sur les rochers et écouter maman répéter que, décidément, quand elle était petite, il y avait une plus grande diversité.
S’émerveiller devant les crabes à la démarche maladroite et les petits poissons qui s’enfuient.
Sauter dans les vagues et rire, rire, rire ! Il y a toute la beauté du monde dans le rire d’un enfant, non ?
Râler parce que cette année encore, il n’y a pas de coques ; « Tout ça ; c’est à cause du réchauffement climatique et des touristes ! ».
Demander à l’autre : « Elle remonte, là, ou pas encore ? ».
Construire le plus grand château de sable que la marée montante engloutira inéluctablement.
Courir toujours plus loin pour aller puiser l’eau au fur et à mesure que la marée descend.
Secouer sa serviette en évitant d’ensabler son voisin.
Observer l’enfant et son bodyboard, tomber, râler, recommencer, râler, recommencer encore et dompter une vague, enfin.
Jurer qu’on n’a pas froid pour prolonger l’instant malgré les lèvres violettes et la chair de poule.
Rendre les armes et sortir tout grelottant, s’enrouler dans sa serviette et se réfugier dans les bras de maman, un gâteau à la main tout en surveillant ce goéland qui semble s’avancer vers nous avec son air sévère de Monsieur-Pas-Content.
Avaler son goûter, un peu de sable sur les mains. Se dire que le sable sous la dent, ça crisse.
Supplier son père de l’enterrer « mais pas la tête, hein ! ».
Observer l’enfant tenter de vider la mer avec son seau.
Se rêver gentil corsaire en contemplant l’île Tomé puis laisser son regard se perdre vers l’horizon, là où les rêves rencontrent l'infini.
Et lorsque l’après-midi s’achève, rentrer plein de joie et de sable, se doucher et attendre l’apéro en lisant « Les Schtroumpfs et le Cracoucass » ; douce conclusion d’une journée parfaite à la plage.
Et vous ? Quels souvenirs ramenez-vous de vos vacances au bord de la mer ? Les trampolines du Club des Marsouins, le bruit des vagues, les glaces, une épuisette, l’odeur de la crème solaire, des sandalettes en plastique, le cri des mouettes, un seau, une pelle et un râteau, un petit bateau gonflable, des choco Prince quelque peu sablonneux qui croustillent un peu trop sous la dent ?