Jade n'est pas d'accord.

Ça faisait longtemps ! Une chronique en forme de coup de gueule contre… contre je ne sais pas qui d’ailleurs, je n’ai pas retenu son prénom. Appelons-la Jade. Ça donnera une idée du personnage aux amateurs de Mortelle Adèle

— Ah non mais moi, je sais pas comment tu fais ! Je pourrais pas ! Il a sa vie, j’ai la mienne. Non mais, tu te rends compte ? Ça veut dire que tu peux pas te débrouiller sans lui !

Jade n’est pas d’accord avec moi. Pour peu, elle m’engueulerait. La bienséance m’invite à sourire et à entrer dans le jeu de mon interlocutrice du jour, quand mon « Ça » qui est plutôt du genre susceptible, aurait envie de lui suggérer de rebooter son neurone ou, à tout le moins, de procéder à sa mise à jour. Mais ça passerait pour de l’arrogance et de la méchanceté et moi, bah… je suis chou. En gros. Enfin le plus souvent. Enfin bienséante, quoi… Il n’empêche, je ferme ma bouche bien fort et dévie mes pensées sur le café que l’on est en train de verser dans mon ecocup. Mais vache ! C’est pas facile, hein !

J’ai l’habitude d’entendre que globalement, je ne bosse pas vraiment, que moi, je peux aller chercher mon fils à 16 h 30 parce que, bon, je n’ai pas d’employeur et je ne suis pas astreinte à des horaires fixes. Il y a encore un an ou deux, je culpabilisais ; étais-je vraiment en marge du monde réel ? Désormais, ça me fait marrer. Mais, j’avoue que je n’avais jamais encore entendu que compter son conjoint parmi ses clients constituait le summum de l’avilissement féminin, un crime contre ce nouveau féminisme radical voire que… non. Il n’est même pas midi ; restons civilisés.

Quoique je sois atterrée par cette simplification de la pensée - si tant est que l’on puisse qualifier de pensée la mélasse qui sort présentement du cerveau de Jade -, je tente de justifier ma position avec pédagogie, dans un élan d’échange bienveillant et de tolérance fraternelle qui n’a d’égal que mon calme face aux anathèmes lancés sans la moindre nuance.

Tu sais, Jade, le bonheur, ce n’est pas une formule mathématique gravée dans le marbre ! Comme le disait Tonton David, ce grand sage : « Chacun sa route, chacun son chemin », et moi, le mien passe par une petite collaboration familiale.

Charmant CEO et moi avons l’habitude de travailler ponctuellement ensemble et ce, depuis près de 15 ans. J’aime ça et je crois que lui aussi.

À mon humble avis, la vie est un tout. Et séparer nos sphères ne m’intéresse pas. Mon côté corse peut-être qui, malgré mes marinières, fait que, pour moi, la famiglia, c’est important, même si parfois, ça hurle, ça gueule, ça s’envoie des mots doux comme autant de drones ukrainiens sur la tronche à Poutine... Au moins, ça vit ! Et on ne s’en tient pas rigueur. Mais ça suppose ce que l’on appelle de la « bonne intelligence ».

J’ai bossé pour Charmant CEO lorsque j’exerçais la digne profession d’avocat dans une vie antérieure. Parce qu’il me faisait confiance, parce que je ne prenais pas de pincettes. J’en ai tiré de bons enseignements (et de bons honoraires).

Après avoir raccroché la robe, comme on dit, j’ai continué à contribuer à l’insolent succès de ses aventures entrepreneuriales (un peu de pommade ne fait pas de mal !).

Alors, je te le concède, Jade, c’est vrai, la ligne de crête a parfois été difficile à tenir entre l’envie d’aider et l’impression d’être devenue une épouse d’agriculteur auvergnat dans les années 60. Savoir trouver sa place, assumer l’envie et l’énergie que l’on a choisi d’y consacrer n’a pas toujours été facile. Il a fallu trouver nos limites respectives, parler, débattre et parfois négocier devant un bon verre de cahors et un plat de pâtes au pistou.

Depuis que j’ai mis le droit derrière moi, je lui prête ma plume régulièrement. Mes missions sont clairement définies (et déclarées si d’aventure un agent de l’URSSAF lisait ces lignes) et ça fonctionne plutôt bien !

De son côté, il n’est pas en reste et œuvre autant qu’il peut au développement commercial de mon activité, à coup de leçons, d’intervention sur mon site Internet et de coups de pieds au derrière… C’est une métaphore, Jade ! Keep cool

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